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La correction « rentre ton ventre »

Rentrer son ventre, quelle difficulté! Un vrai challenge à lui tout seul, certes, mais il est réellement l’endroit plus important du corps pour chaque mouvement, l’équilibre et la posture, et bien sûr la respiration… Voyons ensemble son champs d’action, ses incroyables capacités à unifier le corps: l’élément clé de toutes sensations. Un « rentre ton ventre » bien plus vaste qu’il n’y paraît!

En dehors de la danse, le ventre est au centre de toutes les attentions publicitaires d’agroalimentaire, de cosmétique, de la mode et du bien-être. Alors pourquoi n’aurait-il pas moins d’importance dans le monde de la danse? Mais quelles en sont réellement les vraies raisons?

Le « rentre ton ventre » en danse classique a d’abord tenu à corriger une vision esthétique de cette partie du corps afin de ne pas casser la ligne vertical du corps. Mais son rôle est tellement plus important en danse classique, que juste une esthétique. Nous allons tout d’abord le découvrir au travers de la respiration puis de sa capacité à unifier le corps au niveau des sensations. Ainsi le « rentre ton ventre » aura enlevé le voile brumeux de sa réelle signification d’ici quelques lignes.

La respiration et le ventre, quel lien ?

En danse nous abordons principalement l’idée de respiration avec une image d’ouverture thoracique par le dos (« respirer par votre dos ») pour ne pas nuire à une certaine esthétique, or naturellement le ventre est un des acteurs majeurs d’une respiration optimisée. Et celle-ci peut être renforcée entre autres par un travail particulier en respiration abdominale hypopressive. Voyons ensemble en quoi cette respiration spécifique pourra nous être utile pour « rentrer notre ventre »?

Tout d’abord quelle est cette respiration abdominale hypopressive?

C’est une méthode de travail de la ceinture abdominale et plus précisément des muscles transverses, de manière douce (mais redoutablement efficace) par un certain type de respiration profonde: la respiration abdominale. Celle-ci consiste en une inspiration abdominale (par le ventre) conscientisée mais non forcée. Puis d’une expiration longue et pressurisée par la bouche (comme si l’on soufflait avec beaucoup de résistance entre les lèvres dans une paille de manière lente mais constante) donnant lieu à une contraction naturelle des muscles transverses pendant toute l’expiration jusqu’à avoir la sensation de plaquer au maximum son nombril vers sa colonne vertébrale (attention à bien garder le bassin en position neutre).

Réellement découverte pendant ma rééducation post accouchement, cette méthode de renforcement musculaire de la sangle abdominale, a été une révélation. A contrario de séries d’abdominaux classiques qui me faisaient gonfler le ventre et me sentir tassée, là le corps retrouvait une tenue naturelle mais gainée, me permettant enfin de sentir cette montée du ventre de façon non forcée. Cette respiration sera pour nous un énorme support pour sentir « son nombril rejoindre son dos » et ainsi rentrer son ventre.

Était-ce suffisant ?

Après plusieurs années d’expérimentation, un petit quelque chose me manquait. La focalisation de l’attention sur une seule partie du corps , aussi centrale soit-elle, me dérangeait. J’avais toujours ce manque d’unité, de globalité au niveau de mes sensations dans le corps. Comme si ce point si précis de concentration coupait mon corps en deux et m’empêchait de sentir et percevoir toutes les parties de mon corps avec la même densité, la même simplicité. Mon principal but étant de pouvoir danser le plus naturellement possible et d’éviter d’avoir en scène une longue liste de corrections à penser, j’ai donc continuer mes propres recherches corporelles et sensorielles. J’en suis finalement arrivée à la conclusion que limiter la sensation de rentrer son ventre à la seule partie du ventre anatomiquement parlant était un énorme frein à ma progression. Alors quoi faire? Jusqu’où étendre cette sensation?

Visualisez, imaginez, sentez…

A votre tour d’expérimenter et de vous laisser porter par cette sensation:

Positionnez vos pieds en 1ère position (confortable) et en position verticale, mais neutre (aucune tension initiale) pour le reste du corps. Maintenant, faites 1 à 2 respirations abdominales hypopressives (pour retrouver dans votre corps les sensations déjà connues) puis étendez cette sensation telle « une toile d’araignée » qui s’étire et s’agrandit, englobant vos jambes vers le bas jusqu’à mi-cuisses. Ensuite, imaginez vers le haut, que cette même sensation perdure et s’étend jusque sous la poitrine, poursuivant sa route tel le dessous d’un soutien-gorge pour prendre accroche au bas des deux omoplates. La sensation générale doit être douce et sans gêner la respiration naturelle. Une sensation de longueur et d’unité de corps vous emmènera vers une certaine plénitude corporelle.

Pourquoi l’image de la toile d’araignée ?

Tout simplement pour ses caractéristiques similaires aux qualités que l’on recherche à la tenue du ventre rentré:

  • Le cœur de la toile d’araignée représente notre nombril et la sensation de rentrer son ventre de manière profonde.
  • Chacun des fils a une résonance sur les autres et restent connectés entre eux, comme notre sensation que l’on étend avec ses accroches toujours connectées à notre centre.
  • Sa souplesse, qui pour nous sera synonyme de grande malléabilité et flexibilité dans toutes les zones concernées par la sensation.
  • Sa grande résistance car peu importe le mouvement, le lien et la sensation resteront présentes mais pas obnubilantes.
  • Sa légèreté qui se traduira dans notre corps par une conscience de la sensation mais surtout pas par un renforcement excessif qui donnerait un effet inverse.

Dans chacune de ces caractéristiques, pensez à la modération, car le trop est l’ennemi du bien. Et des fois à trop vouloir chercher une sensation qui ne vient pas tout de suite à nous, cela peut entraîner l’effet inverse. Laissez le temps au temps, revenez-y régulièrement, mémorisez-là afin de la réemployer aussi souvent que possible, mais surtout soyez disponible et ouvert à votre corps, car nous le verrons à un autre moment, si nous respectons et apprivoisons notre corps, il pourrait bien nous surprendre!

En résumé, nous avons tout d’abord conscientisé un certain type de respiration afin d’obtenir la sensation initiale de rentrée du ventre. Puis nous avons ensuite étendue cette sensation à d’autres parties du corps telle une toile d’araignée. Mais pour quelles raisons et dans quel but me direz-vous?

L’extension de la sensation jusqu’à mi-cuisses va permettre de conserver une certaine longueur dans les hanches, de travailler dans l’allongement tous les muscles du bassin pour finalement stabiliser celui-ci par une tenue assez naturelle, libre au niveau articulaire, connectée musculairement et sensoriellement au ventre. Le tout surtout sans forçage, car je vous en prie préservons nos hanches! Nous l’approfondirons bientôt avec la correction « rentre tes fesses ».

L’extension de la sensation vers le haut jusque sous la poitrine et courant jusqu’au bas des omoplates dans le dos, va permettre de contrôler différents domaines se rejoignant sur deux choses: la stabilité et l’équilibre interne du corps. En étendant cette « toile d’araignée » jusqu’au niveau des côtes et du plexus, nous allons créer une sorte d’apaisement par l’abaissement de ses deux éléments vers le centre du ventre. Le reste du haut du corps jusqu’à la tête va se détendre et devenir beaucoup plus libre et posé. Concernant l’extension du dessous de la poitrine jusqu’à la pointe basse des omoplates dans le dos, elle permettra de mettre en lien le ventre et le dos pour « suspendre son dos » et éviter de se tasser sur les reins ou cambrer. Ainsi l’ensemble permet une stabilisation suspendue sans tensions ni forces de la ceinture scapulaire* au dessus de l’abdomen.

Le ventre en « toile d’araignée » fait ainsi le lien entre le bas du corps et le haut du corps de manière équilibrée, stabilisée et en rapport suspendue l’un à l’autre. En fait cette « toile d’araignée » sera notre colonne vertébrale, musculaire mais surtout imaginaire, pour ce qui nous concerne ici. Son rôle sera capital dans chaque posture et chaque mouvement. Ainsi maintenant, avant même de comprendre et conceptualiser un mouvement de danse, vous pourrez vous imaginer l’image de la « toile d’araignée » en vous. Vous verrez, la qualité de vos mouvements ne sera plus la même, car vous trouverez une stabilité et liberté de mouvements impensables au départ. Le début d’une nouvelle façon de danser, de sentir sa danse grâce aux sensations guidées par les images et votre propre imaginaire.

*ceinture scapulaire: zone constituée d’os et de muscles nécessaires à la jonction des membres supérieurs à la colonne vertébrale et à leur articulation. Chez l’homme, elle englobe les omoplates, les clavicules, le sternum et la cage thoracique.

Prochain article: la correction « baisse tes épaules »

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